Comment obtenir rapidement le règlement d’une créance impayée ?
Le présent article donne un aperçu général des options judiciaires ouvertes notamment aux commerçants et dirigeants d’entreprise qui ne parviennent pas à obtenir amiablement le paiement des créances qu’ils détiennent sur leurs partenaires commerciaux. Les solutions diffèrent selon le degré de complexité du litige et peuvent être adaptées à d’autres situations.
En cas de litige simple : demander une injonction de payer
Si le litige est simple et que vous justifiez que votre créance est en apparence bien fondée, la procédure d’injonction de payer régie par les articles 1405 à 1425 du Code de procédure civile permet notamment de faire ordonner le paiement d’une créance d’origine contractuelle.
Requête au président du tribunal de commerce
Dans un premier temps, il s’agit d’adresser une simple requête au président du tribunal de commerce du lieu du siège social ou du domicile de votre débiteur. Celui-ci n’est d’abord pas informé de l’existence de la procédure.
Une fois que l’ordonnance portant injonction de payer est prononcée, il faut faire signifier par voie d’huissier l’ordonnance à votre débiteur dans un délai de six mois. A défaut, il faudra recommencer la procédure.
Votre débiteur bénéficie ensuite d’un délai d’un mois à compter de la signification de l’ordonnance pour former opposition en vertu des articles 1412 et 1416 du Code de procédure civile.
Le cas de l’opposition
En cas d’opposition, il vous faudra constituer avocat dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la déclaration d’opposition par lettre recommandée avec accusé de réception. Si vous ne le faites pas, la Cour de cassation a récemment rappelé dans un arrêt du 19 novembre 2020 que non seulement la procédure est déclarée éteinte, mais l’interruption du délai de prescription provoquée par la signification de l’ordonnance, est considérée comme non avenue.
Si le débiteur ne forme pas opposition, vous pouvez ensuite demander en application de l’article 1422 du même code à ce que l’ordonnance soit revêtue de ce qu’on appelle la formule exécutoire : dès lors l’ordonnance a la même force qu’un jugement classique et elle vous permet de pratiquer si nécessaire des saisies et des mesures d’exécution forcée.
A cet égard, depuis le 1er janvier 2020, l’article 514 du Code procédure civile prévoit que l’exécution provisoire des jugements est de droit, sauf décision contraire du juge. Autrement dit, même si un appel est interjeté, et sauf décision du premier président de la Cour d’appel d’arrêter ou d’aménager cette exécution provisoire en application de l’article 514-3 du même code, il est possible de poursuivre immédiatement l’exécution forcée du jugement en pratiquant par exemple des saisies.
Cependant, ce n’est pas sans risque.
En effet, dans un arrêt récent du 17 septembre 2020, la Cour de cassation a considéré lorsque le créancier poursuit l’exécution forcée d’un jugement qui n’est exécutoire que provisoirement, il le fait à son propre risque : si le jugement est infirmé en appel, il devra soit rendre le bien saisi au débiteur, soit lui rendre sa valeur, sans qu’il soit nécessaire de démontrer une faute du créancier.
En cas de litige complexe : demander l’octroi de mesures conservatoires pour assurer le recouvrement futur
Obtenir une autorisation préalable
Les mesures conservatoires permettent de préserver le recouvrement futur de votre créance avant d’obtenir un jugement définitif concernant votre litige qui serait trop complexe pour bénéficier d’une injonction de payer.
En effet, si vous ne bénéficiez pas d’un titre exécutoire (le plus souvent une décision de justice), l’article L. 511-1 du code des procédures civiles d’exécution prévoit qu’il est possible de pratiquer une saisie conservatoire après avoir obtenu une autorisation préalable du juge de l’exécution.
Le juge de l’exécution qu’il faut saisir est celui du lieu du domicile du défendeur ou celui du lieu de situation de l’immeuble qui serait l’objet de la mesure.
Pour obtenir une telle autorisation, il faut prouver deux éléments :
- Que votre créance est en apparence bien fondée : il faut simplement qu’il y ait une apparence de créance. En général le juge se référera au contrat qui donne naissance à cette créance et il peut également se fonder sur d’autres documents écrits, comme des bons de commande ou des factures.
- Qu’il existe un péril ou une menace sur le recouvrement futur de cette créance : il ne suffit pas de dire que le débiteur ne souhaite pas régler sa dette. Il faut aller jusqu’à démontrer qu’il y a un risque d’insolvabilité du débiteur ou d’insolvabilité organisée. L’objectif est de démontrer que si l’on attend une décision de justice définitive, on risque de compromettre le recouvrement effectif de la créance, de sorte que la décision finalement obtenue serait devenue futile. Le juge de l’exécution ne prendra en revanche pas en compte le fait qu’il existe un dommage imminent ou un péril pour le créancier c’est-à-dire que, par exemple, votre société risque d’être mise en redressement ou liquidation judiciaire si la créance n’est pas payée.
Les délais
Une fois l’autorisation obtenue, plusieurs délais s’appliquent pour sécuriser la mesure.
Tout d’abord, vous disposez d’un délai de trois mois à compter de l’ordonnance du juge de l’exécution en application de l’article R. 511-6 du code des procédures civiles d’exécution, pour procéder effectivement et régulièrement à la mesure conservatoire autorisée. A défaut, l’autorisation est caduque.
Ensuite, il faut intenter une action sur le fond de votre litige dans un délai d’un mois à partir de la réalisation de la mesure conservatoire, faute de quoi cette mesure est caduque conformément à l’article R. 511-7 du code des procédures civiles d’exécution.
Il existe également des délais spécifiques à certaines mesures conservatoires comme les saisies conservatoires de créances, de droits d’associés ou de valeurs mobilières, ainsi qu’en matière d’hypothèse judiciaire provisoire ou de nantissement judiciaire provisoire.
En toute hypothèse, outre que le fait qu’il vous sera nécessaire de vous faire représenter par avocat devant le juge de l’exécution, son assistance vous sera également nécessaire pour mettre en œuvre les mesures autorisées et garantir à la conservation de votre créance.