Activité partielle : quel risque si mon entreprise n’a pas correctement appliqué le dispositif ?
Le Ministère du travail a largement annoncé, et ce encore récemment par communiqué de presse du 17 septembre 2020, les contrôles massifs déployés pour vérifier le respect des conditions auxquelles est soumis le dispositif d’activité partielle (ex « chômage partiel »).
Un dispositif de contrôle massif en adéquation avec l’ampleur des aides consenties
Selon les dernières données statistiques publiées[1], 29.6 millions de salariés ont été placés au « chômage partiel » par leurs employeurs de mars à août 2020, et ont été rémunérés par ces derniers grâce à cette aide d’état, dont le montant global pour 2020 devrait atteindre un total estimé de 30.8 milliards d’euros.[2]
Si les contrôles sont nombreux (au 17 septembre 2020, le Ministère du travail évoquait 270.000 contrôles à son actif), c’est principalement parce que pour être déployé rapidement, le dispositif a été adapté dans l’urgence en mars dernier, de sorte que les employeurs en ont bénéficié sans quasiment de contrôle a priori, dans des délais records et par autorisation tacite de l’administration, mais sous réserve de vérifications ultérieures.
Quelles sont les règles principales à respecter ?
L’activité partielle a été massivement utilisée depuis mars 2020, mais le dispositif n’est pas nouveau. Le dispositif d’activité partielle est encadré par le code du travail[3] et avait été réformé par une circulaire datant de 2013[4] ; il a été adapté par le décret n°2020-325 du 25 mars 2020[5], afin d’accompagner les entreprises frappées par la crise sanitaire,
- Soit parce qu’elles recevaient du public, et sont contraintes à une fermeture totale, à l’occasion du confinement ou des couvre-feu;
- Soit parce qu’elles font face à une réduction majeure de leur activité, et se trouvent ainsi contraintes de suspendre leur activité, partiellement ou totalement, ou sont privées brutalement de commandes.
Ce qui n’a pas changé : les demandes d’activité partielle formées depuis mars 2020 en raison de la crise sanitaire le sont pour cause de « circonstances exceptionnelles », qui est l’un des 4 cas de recours prévus par l’article L5122-1 du code du travail.
Ce qui a été adapté à l’urgence et à l’ampleur de la crise Covid-19 :
Quelles sont les infractions constatées ?
Dans les cas les plus graves, et qui font pour certains l’objet de poursuites pénales pour escroquerie, ont pu être relevés :
- Usurpations d’identités, adresses emails frauduleuses, entreprises fictives,
- recours à des SIRET inactifs, à des demandes multiples.
La presse s’est ainsi fait l’écho de poursuites engagées par le Parquet dans le cadre d’un vaste système de fraude à l’origine de plus d’1.7 millions de préjudice pour l’Etat, ayant donné lieu à des flux financiers internationaux.
« Ce sont souvent des fraudeurs professionnels ou des escrocs. Les entreprises dans leur écrasante majorité ont joué le jeu », estimait récemment la ministre du Travail, Elisabeth Borne.[6]
Sont également montrés du doigt par le Ministère du travail les erreurs volontaires ou non, telles que :
En temps normalEn application du dispositif exceptionnel COVID-19 La demande est soumise à autorisation préalable de l’administration Les demandes bénéficient d’une autorisation tacite Les délais de traitement des demandes sont soumis aux délais de l’administration Les délais de traitement sont réduits à moins de 10 jours Les demandes n’ont effet que pour l’avenir Les demandes formées à la suite du décret du 25 mars 2020 avaient effet rétroactif au 1er mars 2020 Les indemnisations sont des montants fixes par heure chômée et en fonction de la taille de l’entreprise Les indemnisations sont proportionnelles aux rémunérations, avec un minimum majoré, le reste à charge pour l’employeur est nul si le salaire est inférieur à 4,5 SMIC.
Quelles sont les sanctions encourues ?
Puis-je me prévaloir d’une erreur, d’une mauvaise compréhension du dispositif ?
Certaines entreprises ont commis de bonne foi des erreurs et ont mal appréhendé les « finesses » du dispositif, qu’elles n’avaient jamais pratiqué pour la plupart.
Les règles de l’activité partielle ont été modifiées, adaptées, corrigées, plusieurs fois depuis le confinement, de sorte que les TPE/PME ont pu se perdre dans les méandres des règles qui ont dû être précisées par un question/réponse publié sur le site du ministère du travail, dès le 17 avril 2020, et modifié à de nombreuses reprises ces derniers mois[7].
Ainsi par exemple, si l’administration a largement communiqué sur l’interdiction du télétravail pour les salariés en activité partielle, il restait pourtant possible lorsque leur temps de travail n’était que partiellement chômé (correspondant ainsi à un chômage que l’on pourrait désigné comme partiel parce que provisoire mais également partiel parce que ne concernant que partie des heures travaillées).
Par Instruction du 5 mai 2020 « relative au déploiement du plan de contrôle a posteriori sur l’activité partielle dans le cadre de la crise du COVID-19 », la Ministre du travail a fixé les axes des contrôles et désigné les secteurs et activités « cibles » : le BTP, les activités de services administratifs, de soutien et de conseil aux entreprises, et les entreprises employant une majorité de cadres susceptibles d’être soumis au télétravail (incompatible avec une AP à 100%).
Mais elle a également rappelé que les premiers objectifs étaient la régularisation des demandes d’indemnisation mal renseignées / erronées, et l’incitation à l’auto régularisation, et ce dans le respect du droit à l’erreur prévu à l’article L123-1 du code des relations entre le public et l’administration.